L’usure du bloc (« fretting »)

By | 2018-12-19
L'usure du bloc moteur au vilebrequin et ses roulements à bille.
Bloc moteur et les points d’usure.

Jamais entendu parler? Moi non plus.

Nous, les pilotes, ne sommes jamais exposés à tous les détails qui sont afférents à l’entretien. Pourtant le procédé d’entretien d’un aéronef représente beaucoup plus que l’inspection annuelle. Nous sommes un important maillon dans la chaine fonctionnelle de l’entretien.

Souvent, nous détectons des situations que les mécaniciens seront incapables de reproduire. En plus, de stationner son avion devant le hangar et se tailler en laissant un rapport de défectuosité noté comme: « telle composante US », ne permettra pas de se faire des amis dans la boutique ou contribuera à monter une belle facture salée de dépannage (troubleshooting).

Parfois, les défectuosités qui se développent peuvent prendre de bizarres symptômes. Souvent, ces défectuosités peuvent aussi tout simplement être inconnues de la profession des pilotes malgré ces faits habituels dans le hangar.

Apprendre en aviation

L’aviation est une bien grosse boîte à l’intérieur de laquelle on y retrouve un immense département bien connu sous le nom de « Juste quand vous pensez tout connaître ». Au cours des années, j’ai tenté de ne pas y entrer. Essentiellement, il y aura toujours une situation qui va nous prendre par surprise comme ce fut le cas récemment: l’usure (fretting) au joint du bloc moteur sur un IO-320 de Lycoming. Ce problème apparemment se présente sur toutes les marques de moteurs. Les conditions (symptômes) par lesquelles le problème se manifeste ne sont pas faciles à observer puisque le moteur développe en vol, une puissance exemplaire. Pourtant au sol, en tournant l’hélice on peut sentir une bonne force imaginant que ce moteur offre une superbe compression.

Grâce aux collègues du « Airworthy Comanche Forum » et un bon briefing chez « mes » mécanos (Aviation R.Goulet) de CZBM, nous avons été en mesure d’identifier le malaise.

L’usure du joint de bloc est une situation où un torque insuffisant a été appliqué sur les boulons d’assemblage des deux moitiés. La résultante produisant une micro érosion entre le contact des deux sections. Il n’y aucune cause attribuable à l’exploitation du moteur comme tel. Parfois, le problème est observé suite à l’impact de l’hélice.

D’une façon ou d’une autre, du travail sérieux sera requis sur le moteur passant d’un carter neuf à de l’usinage de précision.

Problème insidueux

Comment reconnaître cette forme d’usure? Tout d’abord au démarrage lorsque le démarreur semble avoir de la difficulté à tourner le moteur. Le démarreur aura beaucoup de peine à passer la première compression même avec une batterie neuve. Effectivement le solénoïde « Bendix » se sera engagé et une forte baisse de voltage conséquente sera observée.

Tournée à la main, une hélice qui est plutôt difficile à tourner sera un premier indice. Elle le sera sur les 360˚, pas seulement lors d’une compression. Cette difficulté est grandement amplifiée lorsque le moteur est chaud au point que l’hélice devient extrêmement difficile à bouger si elle n’est pas carrément figée! Une fois le moteur refroidit, la friction disparaît. C’est assez insidieux comme problème.

Qu’est-ce qui peut bien se produire alors? Essentiellement les roulements à bille du vilebrequin, tel que j’ai compris, sont serrés par l’assise asymétrique des deux parties du moteur. Lorsque le moteur est chaud la dilation thermique serre encore plus les roulements à billes et une fois le moteur démarré, la lubrification élimine toute friction. Les paramètres de vol seront affichées joyeusement dans le vert. Une fois le moteur fermé, la lubrification cesse et il faudra compter une bonne heure ou plus pour graduellement libéré l’étreinte des roulements à bille. Ce sera une mauvaise idée d’y forcer un démarreur pour se remettre en route, oubliez le « démarrage à bras », la friction sera trop forte. Cette friction n’est généralement jamais observée puisqu’une fois le moteur fermé, nous quittons l’avion pour aller dîner ou bien passer la nuit.

Cette description est d’un début de cette forme d’usure, comme tout le restant des conséquences plus sérieuses peuvent se développer allant jusqu’à une panne totale du moteur.

D’autres symptômes peuvent se manifester: des limailles métalliques apparaissant dans le filtre à l’huile lors des changement d’huile aux 50 heures, des pertes d’huile ou une consommation d’huile anormale,

La prochaine fois que volerez, prenez le temps, ce que nous ne faisons jamais, de vérifier la libre rotation de l’hélice avant de quitter le zinc, vous pourriez être surpris juste avant d’entrer au département mentionné plus haut.


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